CHUCHOTEURS ETHOLOGIE pour CAVALIERS et DRESSEURS

Vous êtes laide

Souvenirs

Annie-Noël

Digne
Pensionnat de S.C. (Sierpien Czwartek)
Annie.

« Vous êtes laide »

Dans le cour de récréation, une des pensionnaires, Pierrette E... *, s’approche brusquement d’Annie, une « grande » de 15 ans.
A brûle-pourpoint, elle laisse tomber cette phrase : « votre sœur est jolie ».
Annie, par esprit de famille et parce que c’est vrai, est fière de ce compliment qu’elle accueille, en acquiesçant.
L’intruse, insatisfaite de cette réaction, reprend, avec insistance : « Votre sœur est jolie, mais vous, vous êtes laide ».
Annie ne bronche pas.
L’étude, le latin, en particulier, l’intéresse plus que l’aspect de sa personne physique, correcte, mais sans recherche spéciale.
Elle réalise brutalement, qu’elle « n’aura jamais raison », qu’elle ne sera jamais l’objet d’une quelconque préférence » ; il faudra qu’elle travaille plus et mieux que quiconque ».
Pourquoi les souvenirs de cette scène rapide et ancienne. C’est… parce que Annie s’est retenue de répondre.
Se moquer d’un défaut physique disgracieux et très apparent de son interlocutrice : « une mâchoire supérieure dépassant celle inférieure » était facile. Mais il était interdit par ses parents de se moquer d’un défaut physique, quel qu’il soit.
A la réflexion, était-ce de la méchanceté gratuite ou bien plutôt, l’expression d’un étonnement scientifique » sur l’inégalité de la répartition des gênes des père et mère dans une même famille.
Bravement, un intérêt renforcé pour l’étude, une peur instinctive des compliments sur son physique, ont orienté la « démunie » vers un manque de féminité, domaine à jamais interdit.

(La Sauvage)

* fille d’un hôtelier de Seyne les Alpes.